l’Astro Gazette de la FDAF

n°194 - Décembre 2020

Bulletin mensuel de la FDAF (Fédération Des Astrologues Francophones)

Billet d’Humeur

Marie-Paule
BAICRY

Petit témoignage personnel.

Jeudi soir, jour de Jupiter, en raison de l’interdiction d’ouvrir les salles de spectacles, l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg proposait, sur « Arte Concert », un enregistrement en direct d’un concert initialement prévu en présence. C’est sans conteste avec une certaine joie, en ces temps plombés, que mon mari et moi-même nous installâmes devant notre ordinateur, dans l’attente de ce moment de partage musical, fût-il à distance.

Mais voilà ! Contrairement aux concerts ouverts au public ayant eu lieu entre les deux confinements, un certain nombre de musiciens restèrent masqués durant l’ensemble de la prestation.

Tristesse infinie à la vue de cet orchestre presque sans visages.

Sentiment d’absurdité de voir les instrumentistes à cordes anonymisés derrière leurs masques noirs alors que les instrumentistes à vent jouaient à visage découvert (il le fallait bien, pour souffler dans leurs instruments !). Mais les violonistes seraient-ils plus dangereux que les clarinettistes ou les trompettistes ? Bizarre !

Enfin, chagrin profond devant cet orchestre de haut niveau jouant dans un « Palais de la Musique » désert, vide de public. Drôle de palais !

Finalement, juste envie de pleurer, en dépit d’un très beau concert par ailleurs.


Ce n’est là qu’un exemple, parmi bien d’autres, des absurdités et incohérences engendrées par la mascarade des masques obligatoires un peu partout, entre autres mesures imposées.

Masques en plein air, masques dans des rues parfois désertes, masques imposés six à huit heures par jour à des enfants de 6 ans non contagieux, même masques chez soi suggèrent depuis quelques temps des médecins, bien intentionnés sans doute (un peu trop ?).

N’étant ni médecin ni experte en santé, nous n’entrerons pas dans la polémique de leur utilité sanitaire en certaines circonstances, il existe assez de possibilités pour se forger un avis relativement éclairé. Néanmoins, probablement la réponse n’est-elle pas binaire.


Jupiter et la Persona.

Mais en ce mois où le Soleil traverse le signe du Sagittaire et se trouve donc sous la maîtrise de Jupiter, peut-être le moment serait-il favorable pour questionner ce dieu quant aux nouvelles relations (ou plutôt non-relations) sociales – qui sont de son registre – en train de devenir la norme, avec la bénédiction, si l’on en croit médias et sondages, de trois quarts des Français ! Comment le dieu de l’Olympe se sent-il dans notre société nouvellement masquée ? Est-il heureux de cette évolution si particulière ? Aurait-il par hasard un message à nous délivrer ?


       Zeus (c’est son nom grec), élevé par une nymphe nourricière bienveillante et généreuse, inventeur de la corne d’abondance, est le dieu de l’Olympe à la tête de toute la hiérarchie céleste. Maintenant l’ordre et la justice, il fait régner la paix entre les dieux tout comme chez les humains et veille au respect de la loi et du devoir des hôtes. Garant du pouvoir royal et de la hiérarchie sociale, il tente de régler les différends pacifiquement.

Il est donc par essence un dieu de la sociabilité, mais ses qualités peuvent aussi aboutir, au niveau des humains qui le comprennent mal, à donner une certaine importance à l’apparence et au paraître, en raison d’un souci d’être reconnu par la hiérarchie et les pairs, parfaitement conforme et intégré à la loi de la société. Lorsque l’on entre dans cette logique, le risque est de finir par endosser la peau d'un personnage qui, au fil du temps, correspondra de moins en moins à la réalité intérieure, dont il finira par s’éloigner. C'est ce que Jung a appelé la Persona, qui originairement désignait le masque que portait le comédien, pour indiquer le rôle dans lequel il apparaissait.


        Or, nous voilà tous masqués depuis l’été, officiellement pour nous protéger et protéger les autres. Une fois encore, le propos n’est pas d’être pro ou anti-masques - les réponses sont sans doute bien plus nuancées que cela - mais plutôt de nous questionner sur un plan symbolique.


Symbolisme du masque.

Symboliquement, le masque, quel qu’il soit, et quelle que soit sa fonction, dépersonnalise ; il fait fi de notre individualité ; il nie notre identité.

Dans le cas du masque rituel, c’est pour la bonne cause : à travers ce masque, il s’agit de laisser se manifester le Soi auquel nous pouvons nous identifier, ce qui aura peut-être une incidence sur la personnalité, mais une incidence positive. Il évite également l’appropriation de la connaissance par l’officiant qui n’est qu’un intermédiaire entre la divinité et l’initié. De même pour le héros (Zorro, et autres…) qui, en cachant son identité, abandonne l’orgueil et la reconnaissance du service rendu pour une juste cause, pour entrer dans l’humilité.

Pour ce qui est du masque de carnaval, souvent grinçant et outrancier, il peut parfois jouer un rôle de révélateur de tendances sombres enfouies, habituellement cachées. De même pour le bandit dont le masque révèle à lui seul les intentions maléfiques tout en lui évitant d’être reconnu.

Quant au masque de théâtre, caricaturant des affects tels la tristesse, la colère, le rire, il a pour fonction de figer les émotions de manière permanente et de permettre à l’acteur de se fondre à son rôle en l’isolant de son identité propre. Ce dernier est au service d’une émotion particulière qu’il lui revient d’exprimer.

Contrairement aux masques rituels, de théâtre ou de carnaval, ceux que nous portons sont d’aspect neutre : pas de représentation de visage ; pas d’expression ni souriante ni grimaçante ; pas question non plus, au départ, pour nous tous qui sommes priés de le porter, d’un quelconque désir de dissimulation. Juste un banal morceau de plastique ou de tissu qui couvre une importante partie de notre visage ! Or, symboliquement, cela n’est pas banal !


Symbolisme du visage.

Le visage en effet, est la partie la plus vivante, la plus sensible, la plus animée de notre corps ; il exprime la part la plus intime de nous-même. Siège des organes des sens, il est également le lieu d’expression des sentiments et des émotions. Dans la tradition ésotérique, il est le révélateur du cœur, destiné à l’autre puisque nous ne pouvons le voir nous-même, si ce n’est par reflet dans un miroir qui, sur un plan symbolique, révèle l’âme, ce qu’il y a de divin en l’homme.

Ainsi, lorsque nous rencontrons l’autre en voyant son visage, c’est son individualité, mais aussi sa profondeur qui nous apparaissent, et qui nous permettent d’entrer en relation avec lui, avec son monde sensible, avec qui il est dans son entièreté. Nous lisons sur son visage intentions et émotions, nous ressentons le langage de son cœur, nous pouvons entrer en contact avec son âme même.

Par la bouche, passent le souffle c’est-à-dire les échanges et la vie, la nourriture qui répond à un besoin essentiel et donne du plaisir, la parole créatrice ou poétique qui met en joie, la pensée partagée qui élève, le Verbe qui féconde. Par elle pénètre ou sort l’âme, selon certaines croyances. Besoin, plaisir, désir, partage, joie et convivialité, goût de la vie, sont donc intimement liés à la bouche.

Quant au nez, lui aussi nous permet d’interférer avec le monde et les autres par la respiration, l’air que l’on partage, le Souffle qui met en mouvement et fait vivre. Par le nez, organe du flair, nous sentons odeurs et parfums, mais également, plus subtilement, nous « sentons » l’autre, ou les occasions ou chances à saisir dans notre vie. Aussi le nez est-il un symbole de clairvoyance, de discernement, d’intuition.


Visage masqué.

Masquer le visage, au mieux freine, au pire empêche cette belle part sensible et intuitive, relationnelle et sociale - qu’il traduit et qui nous rend humains - de se manifester dans toute sa plénitude. Dans notre inconscient (ou parfois en toute conscience), porter un masque sur le visage éveille au minimum la sensation d’être retenus sinon muselés. Sans compter la peur et la méfiance de l’autre engendrées par la vision de ce monde sans visages où, de plus, il nous faut respecter des « gestes » (c’est-à-dire des mouvements, du cœur parfois) « barrières » (qui stoppent net ces mouvements). Une communauté où nous est imposée la « distanciation sociale » qui interdit le toucher (dans tous les sens du terme). A quoi s’ajoute le confinement qui nous réduit à la solitude ou à la promiscuité, ou au mieux à des contacts virtuels ou professionnels, donc sérieux et aux antipodes de l’enthousiasme jupitérien. Il a été fait le choix de considérer que tout ce qui appartient à la symbolique jupitérienne n’est pas essentiel : nature, culture, convivialité, plaisirs gustatifs et autres, ont été interdits ; pour ne valoriser que ce qui est rentable et productif, de l’ordre d’une expansion matérialiste, également du domaine jupitérien, mais dans son ombre.


Astrologiquement.

Pris depuis un an dans l’amas Pluton Saturne Jupiter en Capricorne, son lieu de chute, Jupiter nous interroge aujourd’hui.

Quelle société voulons-nous pour demain ? Anonyme ou résolument humaine ?

Quelle place souhaitons-nous y occuper ? Allons-nous pérenniser la soumission au couple Saturne Pluton dans son aspect qui durcit et empêche en surfant, non sans une certaine violence, sur la culpabilisation et la peur de la mort ?

Ou bien sommes-nous prêts à reprendre notre pouvoir, notre responsabilité saturnienne, et à retrouver la foi jupitérienne en l’intelligence du mouvement de la vie ?

Certes, la vie contient en elle le risque de la mort physique, mais le couple Saturne Pluton nous enseigne aussi la voie de la mort symbolique, celle de la métamorphose qui opère un retournement des valeurs matérialistes (Jupiter) et angoissées (Pluton) dans le sens d’une intériorité, d’un retour en notre « demeure » intime (Saturne) qui ouvre de nouveaux et larges champs de conscience jupitériens.

Se relier à l’étoile qui scintille en nous, c’est là la voie lumineuse du Sagittaire et de son maître Jupiter prêt à entrer dans son Essence, grâce au travail de forge du couple Saturne Pluton qui le colore encore actuellement. Et si nous y allions ensemble ?

Marie-Paule BAICRY

Novembre 2020

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Consultations et accompagnement.         

Cours d’astrologie et Ateliers de méditation.

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Un monde sans visage(s)

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