la Gazette des Astrologues

n°170 - Décembre 2018

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Bulletin mensuel de la FDAF (Fédération Des Astrologues Francophones)

20
ans

1996-2016

la FDAF a


“Sur le Vif”

La chronique de

Jacques VANAISE

Je vous invite aujourd’hui à comparer l’astrologie au monde des rêves.

Que se passe-t-il lorsque nous rêvons ?  Des images et des sensations occupent notre esprit.  C’est en tout cas l’impression que nous en avons au réveil, avec le sentiment qu’une scène s’est construite, qu’une mise en situation a eu lieu, qu’une courte histoire s’est déroulée.

Laissons de côté les caractéristiques du sommeil paradoxal durant lequel se produit une forte activité dans notre cerveau.  Il est convenu de dire que cette activité physiologique met en jeu plusieurs structures nerveuses et un grand nombre de neurotransmetteurs.    Mais ce n’est pas cela qui nous intéresse ici.

Ce qui est plus significatif et motivant pour notre réflexion, c’est de considérer (fût-ce comme une hypothèse) que certains « grands rêves » mettent aussi en œuvre des symboles et des images que nous relions volontiers à l’opération subtile des archétypes.  

Ceux-ci sont inscrits dans une sorte d’arrière-monde.  Il s’agit probablement de traces subtiles enregistrées tout au long de l’histoire de la vie et de la conscience ; et qui apparaissent dans notre subconscient en adoptant diverses formes symboliques, qu’il s’agisse d’un objet, d’une figure ou d’un personnage.

Suggérons qu’au cours de nos « grands rêves », notre cerveau ne se contente pas, physiologiquement et mécaniquement, de réorganiser certaines expériences et émotions vécues au cours de la journée qui précède, mais qu’il se rend également perméable, de façon subtile et quasiment « quantique », aux archétypes présents dans la mémoire collective.

Je pense que nous ne faisons pas autre chose dans le cadre de l’astrologie.  A savoir : considérer cette perméabilité, à l’instant d’une naissance, entre le cerveau de l’enfant qui « vient au monde » et la psyché universelle.

Que nous dit un tel parallélisme entre l’astrologie et le monde des rêves ?

Pour progresser dans notre réflexion, il convient de nous entendre sur la nature de ces archétypes.  Admettons qu’ils sont sans doute de deux ordres : les uns sont « fondamentaux » et inhérents aux lois de l’univers (à l’exemple des nombres et de certains processus géométriques de cristallisation) ; d’autres sont « sédimentés » et, en cela, ils attestent l’enregistrement dans la psyché collective (et quasiment dans un monde parallèle) d’images et de situations propres à chaque culture et chaque époque (alors même qu’on observe aussi une universalité évidente entre tous les symboles ainsi engrammés dans l’inconscient collectif).

Faisons donc le pari suivant : cette dimension subtile, faite d’images, de figures et d’hypostases résulte d’un enregistrement progressif dans la mémoire collective tout au long de l’évolution.  C’est ce substrat psychique dont nous héritons et sans lequel nous ne saurions aussi rapidement, dès les premières années de notre vie consciente, élaborer et consolider les marques de notre personnalité.

En ce qui concerne l’astrologie, une question reste sans réponse assurée : comment expliquer que l’agencement de ces archétypes (tels qu’ils interagissent entre eux pour susciter des mythes et pour composer nos histoires personnelles) soit à l’image du ciel ?  

Avançons l’hypothèse d’un champ subtil qui prend place dans le subconscient, tandis qu’il est à la fois structuré par les forces (notamment) gravitationnelles du système solaire et « nourri » par les mythes que les hommes imaginent (mettent en images) pour répondre aux grandes questions qu’ils se posent.  

Mais nous sommes encore loin d’avoir pu entièrement expliquer et démontrer cette hypothèse.  

Considérons qu’il y a, de toute évidence, certains processus ou mouvements en œuvre dans notre subconscient.  Ajoutons que si ces processus sont (dirait Lacan) structurés comme l’est un langage, celui-ci est aussi la prise de parole du praticien astrologue, tel qu’il met en jeu une intersubjectivité entre lui et son consultant, avec le risque de projections personnelles ; ce qui revient, comme dans le rêve, à « dire » l’archétype, ou le symbole, ou l’image pertinente, mais aussi à les déformer, à les dévier, à les masquer, à la mesure de sa propre subjectivité.

En dernière analyse, ce dont nous pouvons être un peu plus assurés, c’est qu’il y a en chacun de nous un double mouvement entre le champ subtil et universel, et notre propre histoire sensible.

Revenons au domaine des rêves.  Lorsqu’un archétype (une image ou un symbole) vient à franchir la frontière subtile de notre inconscient pour « s’exprimer », tout se passe comme s’il utilisait le souvenir d’une réalité correspondante que nous avons mémorisée, quelque part, dans nos neurones.  

Ainsi, imaginons que l’archétype « cheval » ait quelque chose « à nous dire ».  Il va emprunter l’image d’un cheval (beaucoup plus) commun que nous avons observé et dont nous avons enregistré le souvenir.  En cela, l’archétype, à la fois, se révèle et se masque (comme lors de la consultation astrologique) ; ou, si l’on préfère, il communique son « essence » mais en prenant une figure bien plus ordinaire ; dans un rapport, toutefois, de similarité, comme dans les métaphores…

Mon propos n’étant pas d’analyser l’entièreté du processus en œuvre dans le cours de nos rêves, je me limiterai à ce qui vient d’être évoqué pour considérer à présent le champ symbolique qui opère depuis la psyché universelle au moment clé de notre naissance.

Mais, avant de poursuivre, il est utile de rappeler que, dans le cadre de l’astrologie, les archétypes qui sont à l’œuvre sont (obligatoirement) au nombre de douze, tandis qu’ils composent des configurations sans cesse différentes, selon l’organisation du ciel.

Cela étant souligné, j’introduis ici une idée qui peut surprendre : je suis persuadé que les douze archétypes psychiques qui s’activent dans notre subconscient veulent chacun s’exprimer en nous.  Lorsque nous les mettons en parallèle avec le cycle des signes zodiacaux ou, mieux encore, avec les douze secteurs astrologiques, il devient évident que les douze facettes ou attributs ainsi considérés doivent, ensemble, assurer la complétude  de notre réalité humaine.  Ainsi, pour être plus concret, nous devons tous et chacun traverser les douze séquences psychologiques symbolisées par l’ensemble des secteurs et, comme à l’intérieur d’un orchestre, nous avons aussi besoin de tous les instruments nécessaires pour « jouer » notre propre partition.

De ceci, il découle évidemment qu’aucune « planète » ne saurait être meilleure ou moins bonne qu’une autre.  C’est plutôt la place et le rôle relatifs qu’elle joue dans la partition qui soulignent en quoi elle contribue diversement à l’éclosion de notre personnalité et à son actualisation dans le monde.

Ajoutons à présent une nouvelle étape dans notre réflexion.  Pour l’introduire, j’emprunterai cette belle citation de Saint Exupéry : « Si tu veux construire un bateau, ne rassemble pas tes hommes et femmes pour leur donner des ordres, pour expliquer chaque détail, pour leur dire où trouver chaque chose.  Si tu veux construire un bateau, fais naître dans le cœur de tes hommes et femmes le désir de la mer »…

Eh bien, je pense que la psyché collective qui sous-tend la configuration de notre ciel intérieur, à la naissance, distille en nous, subtilement, le désir d’être ou, plutôt, de devenir un « humain » complet.

Ce qui est particulier, c’est que le noyau de notre conscience est une individualité.  Ainsi, nous disposons d’une partition et des instruments musicaux nécessaires, mais nous ne nous limitons pas à jouer la gamme universelle (Neptunienne ?) qui nous est (en quelque sorte) confiée, nous entendons surtout nous reconnaître dans la singularité de notre composition, au point de nous identifier totalement, en périphérie, à ce qui n’est pourtant que le moyen de notre accomplissement.

Par ailleurs, et ceci me paraît fondamental dans le cadre de notre pratique, il convient que nous nous posions sans cesse cette question : « Mais à supposer que nous ayons subtilement le désir d’accomplir notre humanité, comment allons-nous percevoir ce désir et ensuite le réaliser ? »

Ici intervient une clé fondamentale : nous allons à la rencontre de nous-mêmes et de notre propre « désir d’être » à travers nos expériences et nos contacts avec le monde et avec les autres (à commencer par nos parents).  

J’incline à penser (mais cette prudence est quasiment inutile) que les réalités du monde qui vont progressivement nous solliciter et nous interpeller ne sont en rien déterminées comme telles.  Notre ciel intérieur est une chose, les circonstances terrestres de lieu, de société, de famille et de culture en sont une autre.  

Ainsi, notre ciel intérieur est comme l’énoncé d’un désir d’exprimer, dans et par notre histoire personnelle, notre part de l’humanité collective.  Mais cette écriture symbolique de notre modalité d’être ne détermine nullement le récit (par avance) de notre parcours.

Bien entendu, cette affirmation n’est pas nouvelle.  Mais la mise en parallèle de notre outil astrologique avec le monde des rêves aura peut-être accentué cette évidence.  

De même que l’archétype qui cherche à s’exprimer dans notre inconscient, durant nos « grands rêves », s’habille, se masque et se déforme en prenant la figure d’un souvenir faisant partie de notre histoire personnelle, de même notre configuration astrale a beau nous insuffler le désir d’un accomplissement (et parfois avec la force et l’évidence d’une réelle vocation que nous n’aurons de cesse de réaliser), encore nous faut-il utiliser les matériaux du monde qui sont là, autour de nous, et qui n’ont que faire de nos attentes et aspirations intimes.  

Ces matériaux ne sont en rien définis par avance.  C’est nous qui, au mieux, les reconnaissons, les faisons nôtres, les interprétons et les façonnons « à notre image », en un jeu de miroir où chaque situation prend forme et sens, sur base de notre « point de vue ».  

Non, décidément, rien n’est écrit, sauf l’épiphanie d’un désir d’être que nous allons découvrir, entendre, reconnaître, assumer, accomplir, pas après pas, jour après jour…


Pour ne pas être trop long, j’interromps ici cette réflexion que je reprendrai et approfondirai dans mon prochain « Sur le Vif » ; avec cette phrase qui me trotte en tête : « il y a ceux qui rêvent leur vie et il y a ceux qui réalisent leurs rêves… »


Jacques VANAISE

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