la Gazette des Astrologues

n°173 - Mars 2019

Bulletin mensuel de la FDAF (Fédération Des Astrologues Francophones)

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Billet d’Humeur

Pascale PIBOT

Est-ce un des effets anticipés de la conjonction Saturne-Pluton en train de se former ? On dirait qu’aucune censure n’existe plus, que toute retenue a disparu, que les pulsions les plus profondes des individus ne rencontrent plus d’obstacle pour s’exprimer librement. On ne « ronge plus son frein », on lâche les chevaux… A l’image de Jupiter dans le signe du centaure sans doute… Quitte à faire beaucoup de dégâts, physiques ou psychologiques. La « saine colère » prônée autrefois par une ex-candidate à la présidence de la République électrise les foules. Seuls l’opinion ou le ressenti de l’individu comptent et les conséquences individuelles ou collectives ne pèsent plus rien face à cet impérieux besoin d’affirmer un refus de l’ordre en place.

Quand les débordements de violence physique ou verbale émanent de gens qui sont objectivement laissés de côté par la société, on peut à la rigueur comprendre (sans excuser) certains comportements. Mais certains astrologues se croient maintenant également autorisés, en s’abritant derrière le faux nez de leur discipline, à se répandre en insultes, invectives, sous-entendus graveleux et plaisanteries vulgaires contre une personne faisant actuellement office d’ennemi public n°1, à savoir le chef de l’Etat. Quand il s’agit en plus de quelqu’un qui inclue le mot « philo » dans son site, on est en droit d’attendre un peu plus de sagesse et de recul.

Posséder quatre planètes en Sagittaire dans son thème et Jupiter à l’opposé de cet amas est-il vraiment suffisant pour parler de survalorisation d’un type zodiacal, d’incommensurable narcissisme (voire de narcissisme flamboyant), de cabotinage, de jobardise, d’une tendance à la manipulation et au double langage ? Si l’auteur de ces propos avait devant lui un consultant présentant le même thème, lui dirait-il en face qu’il est un Sagittaire dissonant et qu’il présente : un dangereux penchant à la mythomanie et à la mégalomanie, qu’il a lui un manque qui ne peut être comblé, une blessure inguérissable, un douloureux sentiment d’insécurité intérieure qui le domine entièrement ? Oserait-il aussi affirmer à ce consultant que son thème reflète une tendance à étaler sa personnalité avec vanité et nombrilisme ou qu’il est un être histrionique, sans gêne et n’ayant aucun souci de l’autre ?

Ces propos outranciers ne font pas honneur à leur auteur, qui pourtant enseigne l’astrologie. Puisse ses auditeurs/lecteurs faire la juste part entre les connaissances astrologiques de l’intéressé et son désir de puissance qui lui font instrumentaliser la discipline pour faire passer ses propres convictions et servir son ambition personnelle.

L’exagération et la caricature ne sont pas les seuls problèmes que j’ai vus dans ce portrait au vitriol d’Emmanuel Macron. Il y a plus grave encore : certains arguments sont assénés avec une évidente mauvaise foi, comme par exemple tous les développements autour du Neptunien hors normes et confusionnel. Comme le dit l’auteur, on sait que Neptune peut favoriser l’émergence de personnalités inspirées et visionnaires quand la planète est bien aspectée mais elle peut aussi entraîner un flottement et une fuite hors de la réalité lorsque ce n’est pas le cas. Or, dans le thème d’Emmanuel Macron, Neptune ne fait que des aspects harmoniques : conjonction avec Vénus, sextile à Pluton et trigone à Mars. Comme l’auteur peut-il donc se permettre d’assimiler le Président de la République à un affabulateur de génie, un bonimenteur capable de faire rêver un Inuit devant un Frigidaire, un menteur, affabulateur, mystificateur, vendeur de salades, un bonimenteur prêt à inventer n’importe quelle fable si elle sert ses intérêts ou satisfait son délire ? Et je ne rapporterai pas ici les insinuations encore plus inacceptables (toujours soit disant justifiées par la position de Neptune dans le thème !) qui traduisent l’homophobie manifeste de l’astrologue en question.

Personnellement, j’ai toujours envisagé l’astrologie comme un moyen merveilleux de mieux me comprendre et surtout de comprendre les autres, une école de pensée où l’on apprend à accepter les différences, à voir ce qu’il y a d’intéressant dans chaque individu. S’arroger le pouvoir de juger et d’exécuter symboliquement quelqu’un en s’appuyant sur une interprétation subjective de son thème me révolte.

Inutile de dire que je me suis désabonnée immédiatement de la newsletter de la personne en question. Sa lecture m’a donné la nausée.

Pascale PIBOT

« Une saine colère ? »