l’Astro Gazette de la FDAF
n°195 - Janvier 2021
Bulletin mensuel de la FDAF (Fédération Des Astrologues Francophones)
“Sur le Vif”
La chronique de
Jacques VANAISE
À moins que de considérer l’agitation des neurones de toute l’humanité durant la nuit de la Saint-Sylvestre, ce passage à « l’an neuf » est-il absolument significatif ? Après tout, il ne s’agit que d’un changement de date, de calendrier et d’agenda. Pour l’astrologie, d’autres instants archétypaux2 sont bien plus édifiants : ainsi la Nouvelle Lune du 14 décembre 2020 et le Solstice d’hiver du 21 décembre3.
Les astrologues n’ont pas manqué de commenter la triple conjonction de Pluton, Jupiter et Saturne en Capricorne, au carré progressif de Mars en Bélier.
Cette configuration n’est évidemment pas « la cause » de la pandémie et des crises sociales, psychologiques et économiques qui en résultent et qui en découleront encore. Voyons-y plutôt ce qui s’actualise dans l’imaginaire collectif en tant que phase importante au cours d’un double processus de maturation et de mutation dont l’humanité est à la fois le creuset et l’enjeu.
C’est après (et après seulement) avoir observé et décrypté ce climat d’ordre psychique et archétypal que nous pouvons nous hasarder à commenter l’actualité et, en l’occurrence, les tenants et aboutissants de la Covid-19 et de ses implications.
Ce qui fait sens, selon moi, ce sont les indices et les enseignements de la période très particulière que nous vivons, compte tenu du climat qui prédomine dans le ciel collectif.
Ce qui revient à dire que la crise de la Covid-19 est indicative de ce qui devait être révélé4 au sein de l’imaginaire collectif ; tandis qu’une autre situation extrême (une guerre mondiale ou une catastrophe écologique majeure) aurait pu, tout aussi bien, en être le révélateur.
À ce titre, je pense que la crise majeure de la pandémie peut (ou devrait) être perçue à la manière d’une catharsis qui, en tant que méthode thérapeutique, vise à produire une situation de crise qui, à son tour, nous incite à changer de référence. Il y est question d’un arrêt sur l’image, comme lorsqu’on se trouve au pied du mur.
On le comprend, ma proposition est de prendre de la hauteur, sachant bien entendu que toutes les mesures édictées par les autorités médicales et / ou politiques sont (variablement) nécessaires. Prendre un tel recul, ce n’est donc nullement sous-estimer ce que nous vivons chacun et chacune dans notre quotidien violenté par le virus et ses répercussions. C’est nous placer sur un plan méta – physique, à savoir par-delà les réalités concrètes de la crise de la Covid-19, sans les ignorer, mais en nous situant au niveau de la co – incidence ou, si l’on préfère, de la synchronicité entre, d’une part, l’état du monde (et l’irruption d’un facteur aggravant : la Covid-19) et, d’autre part, l’alchimie subtile qui opère au sein de l’imaginaire collectif. Ce qui indique en quoi la pandémie et ses répercussions ont un effet accélérateur sur une prise de conscience nécessaire et qui devrait se produire d’une manière ou d’une autre.
Que s’est-il passé, concrètement, tout au long de cette année qui s’achève ?
Nous avons été fragilisés au niveau de ce qui nous est le plus essentiel : notre corps et notre santé.
Mais ce que le virus produit également, c’est l’impossibilité de nous fier aux réponses habituelles. L’agresseur est invisible et sournois. Certes, la science s’emploie à comprendre les stratégies de l’assaillant et nous pourrons bientôt, espérons-le, disposer des armes pour le vaincre.
Bien d’autres l’ont dit et écrit avant moi : « et ensuite ? »
Et ensuite, grâce à une immunité suffisante et grâce au vaccin, reviendrons-nous à nos habitudes, comme si rien ne s’était passé ; hormis l’absence de nos proches ou amis, emportés par la maladie (plus de 19000 morts fin décembre 2020, pour un petit pays comme la Belgique) et mis à part les sombres souvenirs qui nous hanteront encore quelque temps ?
Une situation comme celle que nous vivons (et demain, ce sont sans doute les alarmes environnementales qui reviendront au-devant de la scène) crée, par excellence et au niveau archétypal de l’imaginaire collectif, une situation philosophique.
C’est elle que désignent les configurations astrologiques du moment. Le reste a beau conditionner notre quotidien, ce n’est que « bruit et fureur » …
Le climat très particulier d’un confinement et d’une mise à distance avec nos collègues, nos amis et surtout nos proches, crée en effet une expérience philosophique à grande échelle, surtout lorsqu’elle conduit à un quotidien plus contemplatif, plus lent, prêt à la réflexion, sinon à la rumination.
Philosopher, cela doit ressembler à cela, à cette attitude (cependant plus contrainte que librement choisie) des moines arrimés à une quiétude silencieuse. De fait, dans une telle situation de cloisonnement, nous voici amenés à ne plus penser par autrui, à ne plus nous investir au premier degré dans le shopping, les repas en ville, les sorties ; contraints à l’écoute qui est tout le contraire de la distraction, de la dissipation, de l’absence. D’où le paradoxe d’une absence de l’autre et d’une plus forte présence à soi.
Un tel contexte nous met ainsi en face de notre vide intérieur, dès lors qu’il n’est pas empli, voire envahi, par le brouhaha du monde. Habiter ce vide par une subtile parole à laquelle nous ne prêtions nulle attention , c’est déjà philosopher…
Tout fait ou refait question. On se remet à réfléchir. Face à l’improbable et à l’incertitude, voici l’urgence de donner des réponses. Or, la philosophie ne donne pas de réponses. Elle suggère tout au plus une méthode pour se poser les bonnes questions.
Nous voici donc essoufflés pour terminer l’année ; alors même que ce dont nous avons besoin, c’est précisément d’un nouveau souffle, venant de nos profondeurs .
Ce qui nous fera du bien, autant qu’une relance de notre économie, qu’une réouverture des théâtres et des cinémas, qu’un retour vers les lieux de contacts et de convivialité, c’est une nouvelle vérité ; une vérité qui n’est pas encore, pour un temps, conceptualisable, faute de repères.
En temps normal, les cultures pèsent de tout leur poids sur nos modes de pensée, jusqu’au dogmatisme. À l’inverse, lorsque survient le doute, plus rien ne va de soi. Nous voici donc dans un sas, le passage vers l’an neuf n’étant plus le seul fait d’un réveillon, à moins qu’il ne s’agisse… de nous réveiller.
Le virus nous a arrachés de nos certitudes. Après l’urgence de soigner les corps, d’épargner des vies et de sauver la culture et l’économie viendra le temps d’un autre regard sur ce que nous aurons vécu. Le confinement aura été une expérience existentielle, durant ces mois où notre corps même n’était plus notre point d’appui, puisqu’il était mis en péril.
Viendra donc le temps d’aller au plus profond, par-delà nos angoisses, de sorte que notre pensée se libère, à la manière de l’oiseau qui sort de sa cage .
Lorsque nous tendons le nez vers le ciel, nous percevons bien (ou nous devrions percevoir) que les réalités matérielles sont toutes relatives.
Quand on en revient à l'origine de la vie, au centre de notre corps redécouvert dans toute sa fragilité, un vertige nous saisit. Ce qui évoque une subtile loi naturelle qui consiste à utiliser les accidents aléatoires comme des coïncidences significatives et utiles pour faire émerger la nouveauté.
Pas étonnant que des phases de crises viennent cycliquement nous bousculer en vue d’affranchir notre conscience pour la libérer de ses automatismes et de sa propension à aborder chaque circonstance, chaque objet, chaque événement conformément aux normes déjà enregistrées dans notre mémoire.
Alors, se produit véritablement un rapport d’incidence (une co – incidence) entre une situation extrême, voire dramatique, comme l’est la pandémie, et l’actualisation, l’éveil ou la sollicitation d’une réalité intérieure.
Un petit rien, un presque rien , un quelque chose d’inexplicable existe au cœur de l’humain et émerge, ci-et-là, dans l’histoire des sociétés et des cultures, non pas en dépit des circonstances, mais comme pour les guider, les éclairer, les devancer…
À intervalles réguliers, un nouveau besoin de reliance bouleverse ainsi ce qui semblait définitif.
Il bouscule les priorités et il formule d’autres possibles grâce auxquels les hommes établissent de nouvelles cités.
On le sait, les poètes l’ont toujours dit. Mais le plus souvent, ils crient dans le désert.
Alors, comme aujourd’hui, ce n’est que lorsque les sociétés se découvrent dans une impasse ou lorsqu’elles sont ébranlées de fond en comble par une crise majeure, que l’homme commence à se demander comment ? où ? pourquoi ? il s’est trompé de chemin .
Lorsque nous nous sentons dans une impasse, une couleur de nuit assombrit notre cerveau, fruit de millions d’années d’évolution.
Qu’est devenu l’arc-en-ciel que nous avions en tête, composé de confiance en l’avenir ?
Tout se passe comme si, au moment de faire nos premiers pas dans un nouveau millénaire, nous avions tout recouvert d’une couche sombre : plus de rêve, plus d’espoir ; mais de la peur, de la méfiance, de l’intolérance, tout cela étant intensifié par la crise sanitaire et à la fois répercuté et amplifié par les médias et les réseaux sociaux.
Comment redonner un certain éclat et des couleurs à l’imaginaire des hommes ? Comment réenchanter le monde ? Pourquoi et comment continuer malgré tout ?
Attendre ? Retarder le départ ? Postposer la décision ?
Peut-être. Mais, entre-temps, dans l’âtre, les tisons deviennent cendre…
Dans l’esprit de ce que j’ai tenté de cerner dans cette chronique, souhaitons-nous, les uns aux autres, un passage salutaire vers l’an neuf.
Jacques VANAISE
Pour tout contact
jacques.vanaise@skynet.be
1er janvier 2021, 00H00 à Greenwich1
Sur le vif
«…la philosophie ne donne pas de réponses. Elle suggère tout au plus une méthode pour se poser les bonnes questions.»
« …que notre pensée se libère, à la manière de l’oiseau qui sort de sa cage . »
« Attendre ? Retarder le départ ? Postposer la décision ? Peut-être. Mais, entre-temps, dans l’âtre,…»
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1 Le méridien de Greenwich est évidemment la référence universelle. Quant au Nouvel An, il est successivement célébré depuis l’extrême Est, jusqu’au retour au point de départ, déjà le lendemain…
2 Comme j’aime les nommer – se reporter à mes chroniques de novembre et de décembre.
3 On relèvera cependant une chronologie entre les trois dates choisies. 14 décembre, éclipse totale du soleil : Soleil – Lune en carré à Neptune. La conjonction Pluton, Jupiter et Saturne en Capricorne est activée par le carré de Mars en Bélier. 21 décembre, solstice d’hiver : Lune en carré au Soleil. 1er janvier 2021 : Lune en opposition à la conjonction Pluton, Jupiter et Saturne, et en carré à Mars.
4 C’est le sens même d’une apocalypse : une révélation.
5 Cf. dans le thème de l’éclipse totale du soleil, le carré de la conjonction Soleil Lune au MC avec Neptune en Poissons.
6 C’est le rôle de Pluton, en débat avec Jupiter et Saturne.
7 Uranus en carré à la conjonction Jupiter – Saturne.