la Gazette des Astrologues

n°166 - Août 2018

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“Sur le Vif”

La chronique de

Jacques VANAISE

Le Secteur VIII  devient alors initiatique, parce qu’il nous fait entrer dans l’épreuve du réel.  L’échéance inéluctable de la mort suscite le double sentiment de l’urgence et de la dérision.  Nos réalisations ne sont, après tout, que des excroissances refroidies d’une autre finalité.  

Face à cela, nous sommes bien seuls, irrémédiablement seuls.  Nous compensons par un investissement de chaque instant.  Jusqu’au moment du repos, cherchant le sommeil, percevant alors et avec plus d’intensité le risque du lâcher-prise qui, dans le rêve, ouvre les tiroirs secrets de notre inconscient, au risque de découvrir notre monde englouti.

Lorsque la libido se retire de l’objet du monde, nos investissements sont mis à l’épreuve.  Nous serions tentés de tout reprendre à zéro.  C’est alors que la double polarité du stade anal se précise : aller de l’avant, à tout prix, choisir les extrêmes, se dépasser, rechercher le frisson, y compris celui du danger, en défiant le monde, au risque de tout perdre (Anal relâché) ; ou, au contraire, se prémunir, se sauvegarder, garder le contrôle (Anal replié).

Plus concrètement, nous préférons aborder le monde et approcher les autres, les conquérir, les posséder, les fasciner (Pluton) plutôt que nous faire avoir, de nous laisser prendre par surprise, y compris « par derrière » (Vierge / Cérès).

Revenons au mythe. Déméter est déchirée par le cri de détresse qu’elle a entendu au moment de l’enlèvement de sa fille. Son tourment l’incite à parcourir (Jupiter) terres et mers à sa recherche.  Elle sera tentée, d’abord, de se réfugier dans l’affliction et de refuser à la terre la fertilité attendue par les hommes (Saturne).  Mais elle se ravisera, tout en dénonçant le processus même de la vie, rappelant qu’il conduit inéluctablement à la mort. Cette échéance l’affecte et l’effraie. Pour exorciser cette peur, elle tentera de diviniser un enfant (Démophon) et de trouver en lui le substitut d’un dieu vivant et surtout immortel.

Dans cette attitude, face au passage de l’un au multiple aussi bien que de la vie à la mort, Déméter devient une figure « médiante » ; alors même que sa séparation avec sa fille (désunion entre l’inconscient et le conscient, entre la vie et la mort, entre le rêve et la réalité) est le fait d’une intervention (Hadès) extérieure à son lien étroit avec sa propre fille ;  intervention qui la contraint à se confronter à une force qui rompt l’unité originelle.  

C’est ce qui se produit en chacun de nous, puisque si nous sommes chacun relié au patrimoine imaginaire commun, nous sommes aussi séparés et différenciés dans l’espace-temps de notre héritage génétique et culturel, et puisque nous sommes chacun dépendants des circonstances précises et distinctes de notre naissance aussi bien que des aléas de notre parcours dans la vie et dans le monde.

Dans le monde d’Hadès (dans l’enfer de la réalité quotidienne), il est proposé à Perséphone de devenir reine.  Traduisons : de s’accomplir dans un rôle particulier, de s’accomplir dans une mission particulière et, surtout, de s’identifier à la réalité concrète d’une identité, d’un personnage, d’une persona (cette part de notre personnalité qui organise notre rapport à la société et dont découle notre façon si personnelle de nous couler dans un personnage socialement défini, afin de tenir notre rôle social).

Dès lors, la séparation caractérisée dans le mythe de Déméter et imposée de l’extérieur (par Hadès) nous conduit, en tant que sujet, à vouloir à tout prix nous assumer dans le monde.   

C’est pourtant de ce côté-là que la mort est la chose la plus redoutable et la plus manifeste.  Nous n’y pouvons rien changer, puisque contrairement à la vie des dieux, la vie des hommes porte en elle-même la mort. Or, sur un plan spirituel, si cette vie des hommes en appelle à la mort, c’est aussi, en contraste, pour rendre possible la vie de l’esprit.

En dernière analyse, Déméter exprime la crise de séparation d’avec l’unité de l’Esprit par un arrêt du processus nourricier, dans un mouvement de repli ; alors même que c’est ce retrait qui permet à l’humain d’entrer pleinement dans son processus d’individualisation et de s’y manifester pleinement, et puis : d’y croire.

D’y croire, jusqu’à ce que la peur de la mort resurgisse dans toute son horreur.  Mort qui, ici, est synonyme d’échec ou, tout au moins, du risque de l’échec (j’ai peur de n’avoir pas assez fait, dit Roland…)

Mais, car il y a un "mais"…, si l’alternance des saisons est un bon compromis dans le mythe de Déméter et de sa fille, en harmonie avec le rythme de la vie végétale, elle ne satisfait pas pleinement ce qui, en l’homme, est en recherche d’individualité, de liberté et de nouveauté.

De fait, notre besoin de singularité, d’accomplissement personnel et de réussite dans le monde tranche avec la nature, en tant que telle ; nature qui n’a que faire de cet homme en quête d’autonomie, étant, quant à elle, bien plus proche du mouvement cyclique de l’univers.

Nous voici donc, le plus souvent, engagés dans un véritable combat pour nous affirmer personnellement, alors même que cette incarnation accentue notre refus de l’inaboutissement, autrement dit de la mort.  

La nature nous désigne son cycle de croissance, depuis le grain jusqu’au fruit. Celui-ci, parvenu à maturité, retourne à la terre pour assurer de nouvelles récoltes. Or, nous ne sommes pas prêts à « nous sacrifier » dans le flux d’un tel renouvellement. Nous réclamons un autre sens, une autre finalité. Celle-ci est-elle à trouver du côté d’une subtile éclosion, celle de l’Esprit qui, au fil des générations humaines, parvient à triompher de la mort. Car l’Esprit, lui aussi, aspire à «être», mais sans être contraint de prendre corps, de s’incarner, d’exister (ex sistere : être au-dehors) ?

Il est clair que le sujet pleinement conscient ne peut être dans le monde sans traverser l’enfer de sa mise en situation, dans l’espace-temps de sa vie et de son incarnation. S’il y a en-suite un retour à l’infini et à l’unité, dans le silence de la mort, nous aspirons à ce que ce ne soit pas sans accéder à quelque chose de plus subtil, de plus complexe, par exemple en laissant une trace, de ce côté-ci, dans le monde, ou en vivant un hypothétique prolongement de l’autre côté du miroir…  

C’est dans une telle perspective que nous nous interrogeons à propos de ce qui opère en nous et nous conduit, non plus uniquement à assumer et à assurer notre différence et notre rôle dans le monde, mais à être à l’écoute de ce qui se prépare, en retrait, dans notre subconscient, par-delà ce qui caractérise et conditionne notre actuelle existence.

En cela, nos interrogations sur le sens de la vie se dédoublent en un questionnement à propos de notre parcours terrestre et en une méditation quant à sa réelle portée par-delà l’espace-temps de notre vie.

En ce qui concerne notre croyance en une réalité objective des choses de la terre et de la vie, nous pouvons considérer que la conscience et la raison contribuent à nous extraire de l’irréalité de l’imaginaire et du surnaturel (Neptune).

Or, le paradoxe est que nous faisons la même chose dans la création des mythes.  En effet, nous y personnalisons nos pulsions et nos traits personnels dans des figures, des personnages, des dieux.  Ceci est évidemment commode pour en parler.  Mais ceci nous fait croire que nous sommes sous la gouverne des dieux (et, dans le cadre plus particulier de l’astrologie, des planètes).

Gardons-nous donc d’objectiver hors de nous ce qui se passe en nous.  Nous sommes le lieu d’un processus interne et subjectif, non le produit d’une influence ou d’une détermination externe et objective. Les anciens le disaient déjà : le ciel astrologique est au-dedans de nous.

Pour relier cette observation au thème de Roland, il est utile de revenir à sa peur de «la» mort.  Et d’évoquer, non de sa part, nécessairement, mais de la nôtre, la figure de la faucheuse qui, disions-nous déjà plus haut, survient le plus souvent à l’improviste.  

Pourquoi objectiver ainsi « la » mort ? Intervient-elle à la manière d’un squelette portant une toge noire avec capuche?

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Sur le vif

La chronique de Jacques Vanaise  (1er août 2018) (page 3)